
Un simple retard de soumission des comptes ne constitue pas une infraction pénale pour le gérant de SARL
La Cour de cassation a récemment rappelé que le simple retard dans la soumission des documents comptables à l'assemblée des associés ou à l'associé unique d'une SARL ne constitue pas un délit au regard de l'article L 241-5 du Code de commerce (Cass. crim. 12-2-2025 n° 23-86.857 F-B). Cette décision clarifie l'interprétation de la loi et souligne l'importance du principe d'interprétation stricte du droit pénal.
Le cadre légal du délit
L'article L 241-5 du Code de commerce prévoit des sanctions pénales pour un gérant de SARL qui ne soumet pas à l’assemblée des associés l’inventaire, les comptes annuels et le rapport de gestion. Toutefois, depuis la réforme du 22 mars 2012, ce texte ne sanctionne plus le fait de ne pas convoquer l’assemblée dans les six mois suivant la clôture de l’exercice.
Ainsi, un retard dans la soumission des documents comptables ne suffit pas à caractériser une infraction, tant que ces derniers sont effectivement présentés à l'assemblée.
Une interprétation stricte du droit pénal
Dans cette affaire, la Cour de cassation a censuré une décision d’appel qui condamnait un gérant pour non-soumission des documents comptables dans le délai de six mois. En appliquant strictement le texte, la Cour estime que la sanction pénale ne peut être retenue que si les documents ne sont pas soumis du tout à l’assemblée, indépendamment du respect des délais.
Cette position peut sembler paradoxale : un gérant qui ne convoque pas l’assemblée n'encourt aucune sanction pénale, alors que celui qui la convoque mais tarde à soumettre les documents pourrait être poursuivi. Toutefois, la rigueur du droit pénal impose de s'en tenir à la lettre du texte, sauf cas exceptionnels.
D'autres conséquences possibles pour le gérant
Si la sanction pénale ne s'applique pas en cas de retard, le gérant n’est cependant pas à l’abri de sanctions civiles ou commerciales :
- Une faute de gestion peut être retenue si le retard cause un préjudice à la société ou aux associés.
- Une révocation pour juste motif est envisageable si le retard nuit à la gestion de l’entreprise (ex. : CA Paris 7-2-2023 n° 20/06615).
Une décision applicable à d'autres sociétés
Cette jurisprudence s’applique également aux autres formes de sociétés, notamment les sociétés anonymes (SA), les sociétés en commandite par actions (SCA) et les sociétés européennes, pour lesquelles des textes similaires existent (C. com. art. L 242-10, L 242-30, L 243-1, L 244-5).
En conclusion, si un gérant de SARL ne peut être pénalement poursuivi pour un simple retard de soumission des comptes, il doit néanmoins veiller au respect des délais pour éviter d’éventuelles sanctions civiles et commerciales.